|  | ISSN 1661-1802 | 
| | Numéro courant| Anciens numéros| Présentation| Instructions aux auteurs| | 
| Pourquoi une revue suisse de science de l’information ? par Jacqueline Deschamps8367 mots | 
| RésuméLa création d’une revue scientifique constitue à la fois un défi éditorial et académique. La Revue électronique suisse de science de l’information (RESSI) veut faire mieux connaître la science de l’information, discipline qui mérite une meilleure visibilité. La promotion de cette discipline bénéficie d’une situation institutionnelle particulière liée à la création des Hautes Ecoles Spécialisées (HES). La création des HES élargit et complète le domaine des hautes écoles suisses et donne une impulsion à la recherche appliquée. Nous nous proposons de montrer que la création de RESSI s’inscrit dans un contexte scientifique spécifique et dans un développement social et historique. Mots-Clés : Science de l’information – 
        Hautes écoles spécialisées (Suisse) – Recherche 
        appliquée - Epistémologie | 
| La création d’une 
        revue scientifique est un défi à plusieurs niveaux. Un défi 
        éditorial, étant donné les multiples difficultés 
        auxquelles se heurte généralement ce genre d’entreprise. 
        Un défi académique aussi, compte tenu de la concurrence 
        qui règne dans ce domaine entre les instances institutionnelles 
        de production et de diffusion de la connaissance scientifique (universités 
        ou sociétés scientifiques) dont les revues constituent l’une 
        des expressions les plus importantes. Mais si la publication d’une 
        nouvelle revue scientifique constitue une véritable gageure, c’est 
        surtout parce que, en dehors de la contribution d’un nouvel espace 
        de publication des progrès de la recherche et du travail théorique 
        de la discipline concernée, une telle revue doit, par l’originalité 
        des approches, des analyses et des traitements de son objet d’étude, 
        se distinguer des autres revues avec lesquelles elle entre en compétition. 
         Quant à savoir dans quelle mesure une revue scientifique relève 
        le défi, cela dépend naturellement en premier lieu des auteurs 
        qui lui apportent sa matière première, laquelle dépend 
        elle-même des spécialistes qui acceptent d’assumer 
        le rôle aussi déterminant que difficile d’experts, 
        c’est-à-dire de décider si un travail réunit 
        ou non les conditions définies par la communauté scientifique 
        et expressément requises par le comité de rédaction 
        afin qu’il puisse être publié dans la revue. Nous avons 
        d’un côté, la responsabilité de la qualification 
        scientifique et la volonté politique des responsables de la revue 
        et de l’autre, le rôle plus occulte mais sûrement catalyseur, 
        de l’institution qui héberge la revue et le contexte sociopolitique 
        dans lequel elle s’inscrit. Singulier ou pluriel ?La science de l’information est une discipline académique pour certains, un terrain d’application ou un champ interdisciplinaire pour d’autres, elle est souvent associée à la communication avec qui elle entretient des rapports qui ne sont pas toujours aussi limpides qu’on veut bien le croire. C’est aussi intentionnellement que nous parlons de Science de l’information en optant pour science au singulier parce qu’en Suisse, à la différence de la France, nous n’avons pas jumelé science de l’information et communication en « Info-com ». Tout au plus pourrions-nous parler d’info-doc s’il fallait s’allier à un autre champ alors que la science de l’information est en soi une entité complète qui inclue bibliothéconomie, archivistique et documentation. L’utilisation même des expressions « science de l’information » ou « sciences de l’information » n’a pas été établie une fois pour toutes. Pour Le Coadic, c’est la science de l’information... mais par exemple pour Benoît, ce sont les sciences de l’information. « Il semble que l’extension illimitée des phénomènes associables à ce mot décourage a priori toute synthèse, et disqualifie l’idée même d’une discipline. Aussi parle-t-on des sciences de l’information et de la communication, les SIC, mais cet insurmontable pluriel a de quoi rebuter les esprits rigoureux. » (Bougnoux, 1993 : 9). Ou encore, pour Estivals (1983 : 5) « Le pluriel de sciences de l’information et de la communication couvre l’imprécision. L’argument qui consiste à dire que nos domaines ne sont pas assez avancés pour qu’on puisse les délimiter est une pirouette qui dissimule mal notre ignorance. Est-il besoin de dire que le risque est grand, dans le milieu scientifique de n’être pas pris au sérieux ? » Discipline dont on dit qu’elle se cherche tout en ayant une légitime 
        existence, en France, elle fait partie du paysage universitaire où 
        elle est enseignée au premier, deuxième et troisième 
        cycle et confère tous les grades universitaires. En Suisse, elle 
        n’apparaît officiellement dans aucun cursus universitaire 
        et c’est cette situation qui nous interpelle. On peut se poser la question du lien des bibliothécaires avec 
        la science de l’information. Les bibliothèques sont peu souvent 
        l’objet de recherche universitaire. Pourtant, la recherche qui exige 
        production et investissement intellectuel est susceptible de donner une 
        légitimité dont les effets structurent l’identité 
        professionnelle. On peut aussi penser que la visibilité des bibliothèques 
        par la recherche - fondamentale ou appliquée - représenterait 
        aussi un atout significatif, tant pour les bibliothécaires que 
        les instances institutionnelles. Un contexte institutionnel spécifiqueNotre désir de promouvoir la discipline vient également 
        d’une situation institutionnelle particulière liée 
        à un projet de grande envergure en Suisse : la création 
        des Hautes Ecoles Spécialisées (HES). La création 
        des HES marque un tournant pour les spécialistes de l’information 
        dans toute la Suisse, en modifiant leur système de formation, en 
        leur conférant une reconnaissance fédérale et un 
        titre protégé.  La réforme de l’éducation tertiaire est intervenue en Suisse plus tardivement que dans les pays de la Communauté européenne. Paradoxalement, la bonne qualité de la recherche universitaire en sciences et en ingénierie et la qualité de la formation professionnelle qui permettait à la majorité des jeunes adultes en formation professionnelle d’entrer sur le marché du travail, n’ont pas incité à la mise en route de changements importants. Sous l’augmentation de la demande individuelle et sociale d’éducation tertiaire, alimentée par les compétences exigées par le marché du travail, la vigueur croissante du savoir comme force motrice de l’activité et des performances économiques, des changements touchant l’ampleur, la nature et la valeur de la recherche dans son acception large et d’une dynamique « européenne », l’éducation tertiaire a fait alors l’objet de réformes importantes. La création des HES en Suisse, élément de nature conjoncturel, correspond aussi à un mouvement d’harmonisation des formations universitaires au niveau européen. La transformation des écoles supérieures en Hautes écoles 
        spécialisées vise à élargir l’offre 
        de formations universitaires en Suisse en y incluant des filières 
        de formation du niveau des hautes écoles, de caractère à 
        la fois scientifique et pratique et à renforcer l’euro compatibilité 
        des diplômes. L’un des objectifs qui a présidé 
        à la naissance des HES a été aussi d’élargir 
        la fonction des écoles qui jusque-là était limitée 
        à l’enseignement en leur confiant des tâches de recherche 
        appliquée, de développement et de prestations de services 
        à l’intention de l’économie (transfert de connaissances 
        et de technologies). Si la coopération avec les milieux économiques 
        ou institutionnels existait déjà, il en allait tout autrement 
        pour la recherche. Notre propos n’est pas d’écrire l’histoire de la science de l’information ; des auteurs l’ont fort bien fait avant nous et leurs écrits ont d’ailleurs nourri notre réflexion aussi nous ne faisons que mettre en lumière quelques aspects qui nous semblent importants. Nous voulons montrer que la création de notre revue s’inscrit dans un contexte scientifique spécifique et dans un développement social et historique. Une discipline des sciences humaines et socialesLorsqu’on parle de science de l’information la première 
        question que l’on pose généralement est : la science 
        de l’information est-elle une discipline scientifique ? Et ceux 
        qui posent cette question tentent bien souvent de vous prouver que non. On peut, à juste titre s’étonner de voir que la science 
        de l’information a été élevée au rang 
        de « science » seulement quelques décennies après 
        sa création. Prenant comme point de départ cette affirmation 
        de Bourdieu (1976 : 99), « la science n’a d’autre fondement 
        que la croyance collective dans ses fondements que produit et suppose 
        le fonctionnement même du champ scientifique », la science 
        de l’information vient alors s’intégrer dans la famille 
        des sciences et spécifiquement des sciences humaines et sociales. 
         Qu’est-ce que la science de l’information ? Les définitions 
        lexicales permettent de donner une description et de délimiter 
        des frontières aux sujets couverts par le champ, mais elles ne 
        peuvent en donner une compréhension plus approfondie. « Information 
        science is that discipline that investigates the properties and behavior 
        of information, the forces that govern the flow and use of information, 
        and the technique, both manual and mechanical, of processing information 
        for optimal storage, retrieval and dissemination» (Borko, 1968 : 
        3). L’objet d’étude de la science de l’informationL’objet d’étude de la science de l’information 
        est encore à l’heure actuelle matière à débat 
        et loin d’être unanimement partagé au sein de la communauté 
        scientifique, divisée qu’elle est entre plusieurs approches 
        théoriques de l’univers informationnel et donc de l’objet 
        même de la discipline. A cette instabilité correspond une 
        certaine fragilité de ses fondements intellectuels. La science 
        de l’information s’intéresse avant tout à l’élaboration 
        sociale et au partage du savoir. Tout type de savoir étant concerné, 
        qu’il s’agisse de savoir pratique, technique, scientifique, 
        encyclopédique. Quant à l’élaboration et au 
        partage, ils se réalisent dans des contextes sociaux et culturels 
        divers que ce soit une communauté scientifique, professionnelle, 
        culturelle, nationale, internationale ou une organisation humaine telle 
        une entreprise, une université, etc. Pour Le Coadic (1994 : 31), 
        la science de l’information a pour objet « l’étude 
        des propriétés générales de l’information 
        (nature, genèse, effets) c’est-à-dire plus précisément 
        l’analyse des processus de construction, de communication et d’usage 
        de l’information et la conception des produits et des systèmes 
        qui permettent sa construction, sa communication, son stockage et son 
        usage ». C’est la vision défendue par Taylor, Goffman, 
        Zunde qui la définissent comme une science empirique qui cherche 
        à établir des principes généraux afin d’expliquer, 
        de quantifier et de prédire des phénomènes. Selon 
        l’acception nord-américaine défendue par Brookes ou 
        Shera, la science de l’information a pour objet scientifique l’information 
        à travers le message, sa forme, ses codes. Pour Saracevic ou Salton, 
        l’objet est limité à un type d’information, 
        l’information scientifique et technique. Fondin (2001 : 116) définit 
        l’objet de la science de l’information comme « le système 
        d’échange entre différents acteurs autour d’une 
        recherche d’information dont on veut comprendre le fonctionnement 
        et surtout le rôle qu’y joue chaque acteur, pour éventuellement 
        intervenir dessus ». Varet la définit comme « une discipline 
        rigoureuse » et, pour cet auteur, c’est en édifiant 
        une science de l’information que nous saurons un jour ce qu’est 
        l’information pas avant, car si l’objet était connu 
        avant que d’être étudié, cela voudrait dire 
        que nous n’avons aucun besoin d’en instaurer la connaissance. 
         Les caractéristiques de la science de l’informationLa science de l’information présente trois caractéristiques 
        générales qui marquent son évolution. On peut aussi 
        les voir comme des problématiques que traite, ou en tout cas que 
        devrait traiter, la science de l’information. Le champ de la discipline et des recherchesL’autonomie du champ est un autre élément fondamental, 
        mais dans le cas d’une science humaine en constitution, celle-ci 
        ne peut être que faible. Autant l’élaboration conceptuelle, 
        que la légitimation, doit s’opérer en se tournant 
        vers l’extérieur du champ disciplinaire, en direction d’autres 
        sciences. Selon nous, cela ne dévalorise en rien ce champ de savoir, 
        l’une de ses forces consistant justement à savoir se tourner 
        avec discernement vers les champs extérieurs.  Influencée par la théorie de Shannon, la problématique classique des recherches en science de l’information est selon Fondin celle du codage et du décodage de « l’information – contenu » et de sa bonne transmission. Il s’ensuit soit une préoccupation orientée vers le « document – message » souvent d’ailleurs assimilée au lieu de conservation, soit une « approche – objet » vers le système technique qui en assure le traitement et la transmission, soit une « approche – système ». Les professionnels ont encore une autre expression pour exprimer le changement de logique de fonctionnement, ils parlent de « logique de stock vers une logique de flux », slogan à connotation économique. Dans le domaine organisationnel, les chercheurs ont un intérêt commun pour les systèmes d’information mais, informaticiens et spécialistes de l’information sont également intéressés par l’interaction homme - ordinateur. En même temps qu’ils élargissent le contexte des activités d’information, les spécialistes de l’information examinent de nouveau la nature de l’information qu’ils traitent. En faisant remonter les origines de la science de l’information au travail des documentalistes, dans la première moitié du vingtième siècle, on met une forte emphase sur le texte comme forme de base de l’information. Aujourd’hui, il est admis que l’on doit considérer d’autres représentations de l’information, comme égales aux phrases verbales. Cet élargissement du contexte dans lequel les spécialistes de l’information placent leur travail est naturellement lié à l’extension d’activités. Il serait bon, de ce point de vue, de comparer les sujets couverts à l’heure actuelle, dans les revues de science de l’information avec les sujets traités auparavant. Ceci donne une autre raison de penser qu’il est probablement peu profitable d’essayer de tracer une frontière autour de la science de l’information : ses limites changent constamment. La méthodologie de la science de l’informationLe problème de la méthodologie en science de l’information 
        est un domaine encore peu exploité. Du fait que le champ d’étude 
        est vaste, la science de l’information embrasse différentes 
        méthodologies. Quand on les examine, on voit qu’elles couvrent 
        quelques techniques aisément reconnaissables en sciences sociales. 
         Sur une cartographie virtuelle de la discipline, certains pics sont fondés 
        sur des méthodologies dures (analyses bibliométriques par 
        exemple), et d’autres sur des méthodologies molles (études 
        d’usagers par exemple), dans quelle mesure peut-on développer 
        le terrain intermédiaire ? Les questions de base qui intéressent 
        la science de l’information peuvent, dans certains cas, recourir 
        à un mélange d’approches dures et molles pour une 
        résolution adéquate. Par exemple, la recherche documentaire 
        a deux composants – comment les usagers décident de ce qu’ils 
        veulent comme information et comment, une fois cette décision prise, 
        décider de l’obtention de l’information. En termes 
        méthodologiques, le premier est l’issue « molle » 
        et le second la « dure ». Pour résoudre la plupart 
        des problèmes en science de l’information, il est parfois 
        nécessaire d’avoir recours à deux types de méthodologies 
        mais selon nous, c’est plus une force qu’une faiblesse pour 
        la discipline. La science de l’information, s’est appliquée 
        depuis une dizaine d’années au moins, à tirer parti 
        des possibilités d’améliorer les analyses quantitatives 
        et qualitatives concernant les relations dynamiques qui unissent des collectifs 
        d’objets au sein de diverses communautés et leurs modes de 
        représentations graphiques (analyses des communautés, cartographies 
        de recherches, etc.) dans un ensemble de recherches formalisées 
        dans la scientométrie. Des évolutions sont aussi perceptibles 
        du côté de l’ingénierie documentaire, renforcées 
        par l’apparition des mémoires numériques portées 
        par Internet. L’importance grandissante des méthodes d’analyses 
        statistiques et la nécessité de décrire les phénomènes 
        d’émergence de formes stables et instables au cœur de 
        corpus hétérogènes ont renforcé l’usage 
        de modèles comme les graphes conceptuels par exemple. Les pratiques, 
        les comportements et les usages se développent aussi en interaction 
        directe avec l’environnement. La question de la méthodologie nous renvoie à la question des différences entre les disciplines, les sciences dites « dures » arguant qu’il existe une « méthode scientifique » unique et générale. Or, il existe des différences profondes entre les disciplines, portant sur la méthodologie scientifique. On s’accorde pour reconnaître que les sciences humaines sont moins avancées que les sciences de la nature et, effectivement, il est vrai que certains corps de connaissances ne sont pas acceptés par tous les chercheurs d’une discipline comme c’est le cas dans des sciences « dures ». Mais, peut-on dire que cette absence de consensus est réellement liée à un développement insuffisant ? Evolution de la disciplinePour savoir où va la science de l’information, il est nécessaire 
        de regarder son histoire pour déterminer les courants qui se dessinent. 
        Depuis quelques années, bibliothécaires et documentalistes 
        se penchent sur leur histoire (Histoire des bibliothèques, Histoire 
        de la documentation, Histoire de l’information scientifique et technique 
        etc.). La base scientifique de la discipline constitue un thème 
        récurrent, parmi les enseignants et les chercheurs. Bien que les 
        problèmes relatifs à l’information et à son 
        maniement aient toujours existé, la science de l’information 
        est essentiellement une création de la seconde moitié du 
        vingtième siècle. Le terme « information scientist 
        » apparaît dans les années 50 et décrit un scientifique 
        qui est un professionnel de l’information. En 1955, Farradane invente 
        le terme « science de l’information » impliquant qu’il 
        représente une discipline académique plutôt qu’une 
        activité professionnelle. L’ « information scientist 
        » est décrit comme étant proactif en cherchant, numérisant 
        la littérature et présentant les résultats à 
        ses clients. Il est aussi caractérisé comme ajoutant de 
        la valeur à son travail en évaluant la littérature 
        qu’il a cherché, ignorant le matériel de mauvaise 
        qualité et attirant l’attention sur certaines références 
        clés. Dans les années 50, le mot scientifique a une image 
        attirante en Grande-Bretagne en étant associé aux technologies 
        de pointe ; les « information scientists » sont impliqués 
        dans les renseignements militaires, dans la recherche médicale 
        ou encore la production d’électricité à bas 
        prix ! On trouve aussi dans l’histoire de la science de l’information 
        un lien entre les dénominations « special librarians » 
        et « information officers ». Dans les pays francophones, on 
        utilise le terme documentaliste pour information scientist. Bibliothéconomie et science de l’informationLes relations entre la bibliothéconomie et la science de l’information sont souvent ambiguës et floues. Dans ce débat récurrent, la science de l’information apparaît généralement comme une discipline à portée théorique beaucoup plus grande que la bibliothéconomie ou la documentation, celles-ci étant perçues comme des domaines professionnels. « The aim of librarianship at whatever intellectual level it may operate is…to bring to the point of maximum efficiency the social utility of man’s graphic records, wether the patron served is a child absorbed in his first picture book or the most advanced scholar engaged in some esoteric inquiry » (Shera, 1972 : 113). Dans le Dictionnaire encyclopédique des sciences de l’information 
        et de la communication, la bibliothéconomie est définie 
        comme « l’ensemble des processus, règles, moyens humains 
        et financiers à mettre en œuvre pour offrir les meilleurs 
        produits et/ou services, au moindre coût, en tenant compte des besoins 
        des consommateurs (clients ou usagers du service de la bibliothèque) 
        ». Ou encore pour Line, c’est un ensemble composite de connaissances, 
        de compétences et de pratiques qui sont pour la plupart tout aussi 
        utiles dans d’autres domaines professionnels. Calenge l’aborde 
        avec quatre définitions recouvrant l’ensemble du concept 
        : Tout se passe comme si la discipline était tiraillée entre 
        d’une part, une science de l’information partie intégrante 
        de la démarche des sciences sociales et donc appelée à 
        respecter les règles de la rigueur épistémologique 
        dans la construction autonome de l’objet, et, d’autre part, 
        une science de l’information plus portée sur l’ingénierie 
        documentaire, confortée qu’elle peut être dans cette 
        voie par une demande plus ou moins pressante qui la pousse à offrir 
        des « solutions » à des problèmes documentaires. 
        Reste à se demander comment gérer cette tension. On pourrait 
        se demander si l’on n’éviterait pas des malentendus 
        en procédant à l’identification plus précise 
        des différentes postures avec d’un côté des 
        enseignants – chercheurs en science de l’information de type 
        « social scientists » et de l’autre, des spécialistes 
        de l’information, ingénieurs d’un savoir pratique spécialisés 
        dans les questions documentaires. Cette distinction poserait la séparation 
        entre ce qui relève d’abord de la recherche des savoirs et 
        ce qui appartient au champ de la pratique documentaire. Information et CommunicationPourquoi, par qui, dans quelles conditions rassembler dans un même 
        ensemble les sciences de la communication et celles de l’information 
        alors qu’elles appartiennent à deux mondes qui fonctionnent 
        presque toujours ailleurs de façon séparée ?  On peut définir l’objet de la science de la communication 
        ainsi : « La science de la communication cherche à comprendre 
        la production, le traitement et les effets des symboles et des systèmes 
        de signes par des théories analysables, contenant des généralisations 
        légitimes permettant d’expliquer les phénomènes 
        associés à la production, au traitement et aux effets » 
        (Chaffee et Berger, cités par Lazar, 1992 : 4).  Wolton rejette l’existence d’une discipline : « La 
        communication est un objet de connaissance interdisciplinaire, à 
        la mesure de sa dimension anthropologique, et cette dimension de carrefour 
        doit être préservée pour éviter une spécialisation, 
        apparemment rassurante mais en fait réductrice et appauvrissante 
        ». Wolton recommande de se servir du capital d’expérience 
        et de connaissance des disciplines qui participent du champ de recherche, 
        de favoriser la production de connaissances et non la description, de 
        penser la communication dans son contexte et de contribuer à la 
        construction du milieu scientifique en favorisant les revues.  L’apport de RESSIDans ce contexte, il va de soi que répondre à la question 
        « pourquoi RESSI ? » est aussi malaisé que nécessaire, 
        pour des raisons inhérentes à l’essence même 
        de la connaissance informationnelle plutôt qu’à la 
        conjoncture dans laquelle s’inscrit la création d’une 
        nouvelle revue scientifique.  RESSI se propose donc de contribuer à cet effort avec toutes les forces qu’elle pourra puiser dans la faveur de son public de lecteurs, dans la confiance de ses auteurs et dans le soutien des membres du comité de lecture. C’est pourquoi elle ouvre ses pages à toutes les tendances et domaines de la science de l’information dans l’espoir d’accueillir dans chacun de ses numéros des articles reflétant des théories concurrentes, des méthodologies diverses et des orientations épistémologiques différentes. Cette volonté de pluralisme n’est pas synonyme de rabais scientifique, autrement dit si RESSI est ouverte à tous les aspects et les points de vue, elle n’est pas pour autant disposée à accueillir des opinions personnelles non fondées ou des données de recherche lacunaires. Le niveau scientifique des membres du comité de lecture, appelés à expertiser les textes qui seront proposés, constitue une garantie suffisante du sérieux avec lequel nous avons l’intention de nous acquitter de cette tâche difficile. Car il s’agit d’offrir à la communauté suisse et internationale une nouvelle tribune sur laquelle viendront se rencontrer, s’affronter et se mesurer les expressions de la science de l’information avec l’espoir de contribuer à l’impression d’un souffle nouveau à la connaissance informationnelle. Décembre 2004 BIBLIOGRAPHIEBENOIT, Denis. Introduction aux sciences de l’information et de la communication. Paris : Ed. d’Organisation, 1995 BORKO, H. Information science : what is it ? American Documentation, January 1968, 19 (1), p. 3 - 5 BOUGNOUX, Daniel Sciences de l’information et de la communication : textes essentiels. Paris : Larousse, 1993 BOURDIEU, Pierre. La cause des sciences. Comment l’histoire sociale des sciences peut-elle servir le progrès de ces sciences. Actes de la recherche en sciences sociales, 1995, n° 106-107, p. 3-10 BOURDIEU, Pierre. Le champ scientifique. Actes de la recherche en sciences sociales. 1976, 2-3, p. 99 BOURE, Robert. Quelle histoire pour les sciences de l’information et de la communication ? In. BOURE, Robert (Ed.). Les origines des sciences de l’information et de la communication : regards croisés. Villeneuve d’Ascq : Presses universitaires du Septentrion, 2002. P. 17-44 BUCKLAND, Michael, LIU, Zimmimg. History of Information Science. Annual Review of Information Science and Technology (ARIST).1995, vol. 30, p. 385- 415 CALENGE, Bertrand. Peut-on définir la bibliothéconomie ? essai théorique. Bulletin des Bibliothèques de France, 1998, t. 43, n° 2, p. 8-20 COSSETTE, André. Humanisme et bibliothèques : essai sur la philosophie de la bibliothéconomie. Montréal : ASTED, 1976 DESCHATELETS, Gilles. Bibliothéconomie vs science de l’information 
        :…Science de l’information. Documentation et bibliothèques, 
        1994, juillet/septembre, p. 167-168 ESTIVALS, Robert. Editorial. Schéma et schématisation, 1983, 4ème trim.n° 19, p. 5-8 FONDIN, Hubert. La science de l’information : posture épistémologique et spécificité disciplinaire. Documentaliste – Sciences de l’information, 2001, vol. 38, n° 2, p. 112-122 FOUREZ, Gérard, ENGLEBERT-LECOMTE, Véronique, MATY, Philippe. Nos savoirs sur nos savoirs : un lexique d’épistémologie pour l’enseignement. Bruxelles : De Boeck, 1997 KUHN, Thomas. La structure des révolutions scientifiques, Paris : Flammarion, 1972. (1ère éd. 1962) LAMIZET, Bernard, SILEM, Ahmed (Dir.). Dictionnaire encyclopédique des sciences de l’information et de la communication. Paris : Ellipses, 1997 LAZAR, Judith. La science de la communication. Paris : Presses universitaires de France, 1992 LE COADIC, Yves-François. La science de l’information. Paris : PUF, 1994 LINE, Maurice B. Le métier de bibliothécaire : un ensemble de pratiques confuses et discontinues. Bulletin des Bibliothèques de France, 1998, t. 43, n° 2, p. 44-48 METZGER, Jean-Paul. Les trois pôles de la science de l’information. In Viviane Couzinet [et al.]. (Dir.). Recherches récentes en sciences de l’information : convergences et dynamiques : actes du colloque international organisée les 21 et 22 mars 2002 à Toulouse… Paris : ADBS, 2002. P. 17 - 28 OCDE. L’enseignement tertiaire en Suisse : examens des politiques nationales d’éducation. Paris : OCDE, 2003 RAUZDUEL, Rosan. Dialectique et savoir systémique. Bern : P. Lang, 1999 SARACEVIC, T. Information science : origin, evolution and relations. In VAKKARI, P, CRONIN, B. Conceptions of library and information science. London : T. Graham, 1992. P. 5-27 SHAPIRO, F.R. Coinage of the term information science. JASIS, 1995, 46, p. 384-385 SHERA, Jesse H. The foundations of Education for Librarianship. New York : Becker and Hayes, 1972 VARET, Gilbert. Pour une science de l’information comme discipline rigoureuse. T. 1 : profils épistémologiques du concept d’information. Paris : Les Belles Lettres, 1987 VICKERY, B.C., VICKERY, A. Information science in theory and practice. London : Bowker-Saur, 1994. (1st ed. 1987) WOLTON, Dominique. Penser la communication. Paris : Ed. du Seuil, 1997 
 | 
| © Ressi, no.1, janvier 2005, ISSN 1661-1802, tous droits réservés |  | 
| Date de création : 10.01.2005 |