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Le web comme outil de diffusion des archives

par Lorraine Filippozzi

Lorraine Filippozzi, Haute Ecole de Gestion de Genève, filière Information et documentation, 7 Rte de Drize, 1227 Carouge http://www.hesge.ch/heg/

Internet est aujourd’hui un outil de communication privilégié dans de nombreux domaines d’activité, dont les archives font partie. Dans cet article, je présenterai un état des lieux de la présence des archives sur Internet en commençant par une synthèse de la littérature sur le sujet suivie d’une analyse des sites internet d’archives actuels. Cet état des lieux permettra de contextualiser et d’appuyer la démarche de conception d’un site web d’archives que je présenterai en fin d’article. Ce guide méthodologique de diffusion constitue l’aboutissement d’un projet de recherche sur la diffusion des archives sur Internet mené dans la continuité d’un travail de diplôme sur le même sujet (1).

La diffusion des archives : synthèse de la littérature

Les évolutions technologiques dans le domaine de la diffusion des archives méritent que l’on s’intéresse aux nouveaux enjeux qui en résultent. En effet, Internet est à présent le point de départ de la plupart des recherches, et un service d’archives, s’il souhaite être connu du public et mener à bien sa fonction de diffusion, se doit d’y être présent. Le web offre par ailleurs de nombreuses possibilités encore sous-exploitées.

La diffusion comme fonction archivistique
Selon la théorie de la discipline, la diffusion est à la fois une fonction archivistique et une mission pour les services d’Archives. Elle est une fonction archivistique car elle constitue l’aboutissement des activités de création et/ou d’acquisition, d’évaluation, de classification, de description et de préservation. Elle est aussi une mission car « la diffusion de l’information que contiennent les archives est parmi les finalités les plus importantes de l’archivistique » (Couture, [et al.], 2003 : p. 22). Ainsi, on la définit comme étant « l’action de faire connaître, de mettre en valeur, de transmettre et/ou de rendre accessible une ou des informations contenues dans des documents d’archives à des utilisateurs (personnes ou organismes) connus ou potentiels pour répondre à leurs besoins spécifiques » (ibid. : p. 22). Cette définition sous-tend les notions de communication et de promotion, ce qui démontre la tendance actuelle allant vers l’ouverture et la transparence des archives (Laurent, 2003 : p. 13). On observe véritablement une « mutation de la pratique vers des priorités axées sur la diffusion, sur la promotion de nos interventions et sur l’accroissement de l’accès à la connaissance et au savoir » (Aubin, 1999-2000 : p. 11).

Cet effort d’ouverture et de promotion est aussi dû au fait que « la diffusion assure aux centres d'archives une renommée grâce à laquelle ils peuvent justifier les ressources qui leur sont attribuées et prétendre au développement des archives dont ils ont la garde ainsi qu'au développement des services qu'ils offrent » (Couture, [et al.], 2003 : p. 386). Ainsi, le positionnement de la diffusion au sein du système de gestion d’un service d’archives est stratégique. En effet, la diffusion étant le meilleur moyen d'obtenir visibilité et notoriété, elle permet le maintien, voire l'augmentation des ressources pour l'ensemble du service. Il est par conséquent capital d'intégrer cette fonction à la planification générale des activités et, plus globalement, à la stratégie de l'institution. Occupant une position stratégique au sein du système de gestion des archives, la diffusion se doit d’être intégrée à l’appareil normatif et administratif du service d’Archives. Dans ce but, il est recommandé d’établir une politique de diffusion. Cette dernière permet de formaliser et de coordonner les différents aspects liés aux activités de diffusion d’un service d’Archives, ainsi que d’optimiser l’usage des différents moyens de diffusion possibles.

Les moyens de diffusion
Selon la littérature existante, on peut distinguer deux ordres de diffusion des archives : la diffusion par les archives et la diffusion par les archivistes (Couture, Rousseau, 1983 : p. 257). La diffusion par les archives inclut notamment la mise à disposition des archives, la mise à disposition d'instruments de recherche et d'informations générales, la publication (sur tous supports) et l’exposition de documents d’archives, d’instruments de recherche et d’informations générales. Tandis que la diffusion par les archivistes comprend la réglementation de l'accès, de la consultation, de la reproduction, la gestion des chercheurs (le service de référence, la consultation), la participation à des activités culturelles ou de formation et l'entretien des relations publiques.

La diffusion des archives est fondée sur différents moyens, chacun d’eux entraînant le choix et la mise en œuvre d’outils spécifiques. Ces moyens sont le service de référence, la règlementation, la consultation, la publication et la promotion. L'accès est une notion à appréhender tant au niveau intellectuel, physique, que légal. Le service de référence a pour but d’assurer la médiation entre le chercheur et le matériel mis à sa disposition. Il permet l'accès intellectuel aux documents d'archives, mais il doit tenir compte de la réglementation en vigueur. La règlementation peut être de trois types : « la restriction à la consultation, celle qui empêche la reproduction et celle qui interdit la diffusion » (Couture, [et al.], 2003 : p. 404). Ceux-ci influencent considérablement les possibilités de recherche offertes au chercheur, c’est pourquoi un service d'Archives doit faire preuve de transparence dans l’application des lois, règlements et politiques en vigueur. Il s'agit de ce fait d'instaurer « un équilibre entre les besoins des uns et les intérêts ou les ressources des autres » (ibid. : p. 408). La notion de consultation, quant à elle, inclut l'ensemble des éléments permettant l'accès physique aux documents. Elle dépend directement du service de référence qui la précède et l'accompagne. Autre moyen de diffusion, « la publication peut prendre plusieurs formes : publications de documents d'archives, publication d'instruments de recherche, publication d'informations générales » (Couture, Rousseau, 1983 : p. 257). La publication des documents d'archives, principalement sous forme de microfiches ou de documents numériques, permet d'élargir l'accès aux sources tout en les préservant. Mais avant les pièces elles-même, la publication des instruments de recherche permet au chercheur d'estimer l'utilité des fonds proposés sans avoir à se déplacer. De manière complémentaire, la publication d'informations générales, de la présentation du service à l’article historique complet, est aussi un excellent moyen de diffusion et de promotion. Les types et les supports de publication sont aujourd'hui nombreux : dépliant, guide de recherche, livre, périodique, audiovisuel, site web, etc. Ils permettent par ailleurs de contribuer à la promotion des archives.

Le contact entre les archives et leurs publics
Le contact entre les archivistes et les chercheurs peut être établi en face-à-face ou à distance, par téléphone, courrier ou Internet (Cohen, 1997 : p. 6). La diffusion par Internet, « assimilable à une publication, permet de pallier la pénurie des ressources qui limite les possibilités de publication d’instruments de recherche ou de guides du chercheur tout en favorisant un accès à distance et une mise à jour régulière à des coûts, à moyen terme tout au moins, plus faibles. Le contenu de ces sites est à la croisée du contenu du guide du chercheur, du dépliant et de l’état général des fonds. Il informe souvent sur les dernières acquisitions du centre d’Archives. Il peut aussi donner accès aux instruments de recherche spécifiques des fonds ou collections et même aux documents numérisés (unités de description complètes ou spécimens). Parfois, il rend aussi disponibles les normes, procédures et règles suivies par le centre d’Archives dans le cours de ses activités » (Couture, [et al.], 2003 : p. 397).
En informant le chercheur de manière inédite, un site Internet permet ainsi de rassembler en un lieu d’accès unique tous les moyens de diffusion précédemment exposés. Il offre une vitrine des Archives au public, il permet de fédérer tous les moyens de diffusion sur une même plateforme. En effet, un site web permet de proposer simultanément les informations sur l'institution, sur les fonds qu'elle conserve, sur les services offerts et sur la réglementation, ainsi qu'exposer des documents. Permettant à la fois d'anticiper une partie du travail de référence, de préparer le chercheur à la consultation, de disposer d'un espace de communication et d'exposition tout en participant à la promotion de l'institution à moindre coût, un site web se substitue parfaitement aux autres formes de publication (Abraham, 1996 : p. 2).

De plus en plus, l’internaute accède aux sites et aux inventaires d’archives grâce aux moteurs de recherche (Hamburger, 2004). Les services d’Archives se doivent donc d’y apparaître en bonne position. Pour cela il s’agit de suivre les recommandations concernant le bon référencement d’un site ainsi que de démarcher les moteurs de recherche afin que leurs robots recensent aussi les enregistrements contenus dans la base de données du service (Hill, 2004).

Loin de le rendre inutile, tous les moyens de diffusion mis à disposition du chercheur révèlent le rôle de médiateur de l’archiviste. La relation entre l’archiviste et le chercheur est un échange, et la « mission d’information n’est pas à négliger. C’est à l’archiviste qu’il incombe souvent de traduire la demande en termes d’archives » (Favier, 2000 : p. 192). En proposant un nouveau moyen d’accès à leurs utilisateurs, les services d’Archives doivent aussi se donner les moyens de répondre à la demande : salle de consultation adéquate, procédure de réquisition des documents, copies, indication des droits et devoirs de chacun, etc. (Couture, [et al.], 2003 : p. 400). « L’enjeu [de la diffusion] est de faire en sorte que la mémoire soit diffusée de façon à susciter l’intérêt et la curiosité et augmenter le nombre de personnes qui s’y intéressent : il faut adapter, modifier, créer, innover sans nécessairement vulgariser » (Aubin, 1999-2000 : p. 13).

Les activités liées à la diffusion abordent donc à la fois les notions de stratégie, de législation, de gestion des chercheurs et de communication des documents. Intégrée à un système de gestion des archives global et cohérent, la diffusion est un bon moyen d’obtenir visibilité et notoriété, et ainsi de justifier les ressources allouées au service auprès des décideurs.

La présence des Archives sur Internet : analyse des sites actuels

Internet a permis de faire évoluer la communication des services d’Archives et d’influencer leur mission de diffusion des fonds historiques. La littérature spécialisée donne un bon aperçu des attentes du public, des pratiques et des différents enjeux qui se présentent actuellement. Parallèlement, une analyse des sites web d’archives existant sur Internet permet de dresser schématiquement un modèle de site web et de souligner les spécificités techniques qui leur sont propres.

L’évolution des publics
Le monde des Archives l’a vite compris, Internet représente une opportunité à saisir. A la fois source de développement pour la diffusion des documents conservés et nouveau moyen de valorisation des fonds, l’outil web offre de multiples possibilités de présentation des fonds et des services d’Archives au public. Avant de les exposer, il s’agit cependant de mieux comprendre les attentes de ce public, qui change et se diversifie.

Le public classique des Archives, constitué d’historiens et de chercheurs universitaires, a de moins en moins de temps. A l’ère des moteurs de recherche généralisés, « les usagers sont habitués […] à une information rapide, aisément disponible, accessible quasiment à domicile » (Ermisse, 1994 : p. IX). Ils sont de plus en plus réticents à se déplacer sans savoir ce qu’ils trouveront. L’ordinateur est devenu l’outil de travail privilégié, et Internet leur permet de rassembler à distance les informations qui leur seront utiles lors de leur déplacement dans le service pour recherches approfondies. En marge de ces chercheurs avertis, d’autres types d’utilisateurs fréquentent les Archives. Il s’agit principalement des généalogistes, qui depuis une vigtaine d’années ne cessent d’augmenter. A leurs côté, étudiants, amateurs passionnés d’histoire et professionnels de divers domaines (architecture, sciences politiques, géographie, etc.) commencent à s’intéresser aux archives (ibid. : p. 3). Pour canaliser ces différents publics, les services d’archives peuvent leur donner les moyens d'estimer à distance la spécificité et la pertinence des fonds conservés.

L’enjeu pour les services d’Archives est de ne pas passer à côté de cette nouvelle génération familiarisée avec l’outil informatique et développant de nouvelles habitudes de recherche. Il s’agit donc de continuer à promouvoir l’utilisation des fonds et à favoriser la recherche historique en s’daptant à ces nouveaux besoins d’information. Rendu possible par le web, ce véritable rapprochement avec le public permet aux archives de dynamiser leurs activités et de donner d’elles-même une image plus attirante. Pour ces différentes raisons, que les services d’archives ont bien saisies, il est primordial d’être présent sur Internet.

Sites web d’archives : différents niveaux
Pour répondre aux besoin de ces différents publics lors de l’élaboration d’un site web d’Archives, il est possible de rendre disponibles simultatément plusieurs niveaux d'information (Uhde, 2001). Les quelques exemples proposés démontrent que la préoccupation de répondre aux attentes des publics distincts est constante.

Le premier niveau, le plus basique, contient les informations de présentation générale des services d’Archives. Il est composé des informations pratiques sommaires comme les coordonnées de contact, les heures d’ouverture, une description sommaire des fonds (type et volume), et éventuellement le guide du chercheur. A ce niveau déjà, différentes options existent pour présenter les fonds et les collections : listes alphabétiques, répertoires numériques ou thématiques, cadre de classement, regroupement des fonds par périodes historiques ou par sujet. Il est aussi possible de prévoir des chemins d'accès différents pour chaque type de chercheurs ou pour des centres d’intérêt spécifiques.

Le deuxième niveau offre la fonction de recherche dans les archives en mettant à disposition les inventaires des fonds selon les différents procédés possibles. Il est ainsi envisageable de scanner les inventaires et de les proposer en format image ou texte sur le site. Un autre procédé est la conversion des inventaires en format HTML (2). De manière plus élaborée que ces deux premières options plutôt « bricolées », la plupart des services d'Archives mettent à disposition des outils de recherche dynamiques. Il s’agit de moteurs de recherche directement liés aux bases de données des services. Il est en effet possible, selon le système utilisé pour la description, d'en proposer une interface de recherche en ligne (Rosenbusch, 2001 : p. 46), laquelle peut être guidée par différents index et listes d’autorités (géographiques, noms de personnes et de collectivités, etc.). On peut alors véritablement parler de salle des inventaires virtuelle.

Le troisième niveau offre à l’utilisateur la possibilité de consulter directement les pièces du fonds numérisées à l’écran. Les documents d’archives sont accessibles au format image ou même en texte, grâce aux logiciels de reconnaissance optique des caractères. On peut alors parler d’« archives virtuelles » (Valacchi, 2003 : p. 190 ; Lemay, 1998-1999 : p. 12), voire de « salle de lecture virtuelle ». Une des premières réalisation de ce niveau d'information est le site des Archives municipales de Rennes (Rennes, en ligne), qui, depuis 2003, donne progressivement accès en haute résolution aux registres paroissiaux, à une partie du cadastres et des recensements ainsi qu'à deux tiers de l'état civil. Cette option est également souvent utilisée pour mettre en valeur des fonds cartographiques et photographiques. « Depuis 2003, les statistiques de fréquentation des sites internet des services d’archives ayant mis en ligne ce type de documents montrent un afflux de visites dans ces salles de lectures virtuelles » (Minstère de la culture et de la comunication, 2007 : p. 5).

Complémentairement à ces différents niveaux d'information, plusieurs éléments accessoires sont utiles sur un site web d’Archives. Ainsi, avant même de lui donner accès aux sources, il est intéressant d'indiquer au chercheur l'usage qu’il pourra faire des archives. Dans cette optique, il est intéressant de relever l’offre de didacticiels et de foires aux questions (FAQ). Par ailleurs, la mise à disposition de formulaires de demande de recherche et de réservation de documents permet aux chercheurs d'émettre l’objet de leurs recherche et les documents requis et ainsi de préparer leur venue.

Le site web «modèle»
La majorité des services d'Archives a choisi de créer un site à plusieurs niveaux, chacun s'adressant à un public spécifique, du profane à l'averti. « Le contenu de ces sites est à la croisée du contenu du guide du chercheur, du dépliant et de l'état général des fonds » (Couture, [et al.], 2003 : p. 397). La combinaison d’éléments des différents niveaux permet de brosser le portrait d’un site web « modèle », qui contient au moins les rubriques suivantes : présentation du service, informations pratiques, présentation des fonds et des inventaires et, finalement, la proposition de sources complémentaires.

La présentation du service permet de décrire la mission et les activités de l’organisme, d’exposer sa structure interne et son personnel. En tant que « vitrine » du service, cette présentation doit être attractive afin de véhiculer une image positive du service.

Les informations pratiques regroupent tous les éléments ponctuels utiles aux chercheurs qui envisagent une visite du service : horaires d’ouverture, adresse et plan d’accès, conditions d’accès aux documents, présence d’un service de référence, procédures de demandes de recherche, règlement de consultation et de reproduction, etc. Ces informations doivent lui permettre de préparer sa venue dans les meilleures conditions. Dans cette rubrique peut aussi être offert un moyen de contact des archives : téléphone, email, formulaire de contact, etc.

La présentation des fonds et des inventaires constitue le cœur du site web d’un service d’archives. Elle peut contenir différents moyens d’accès aux fonds : liste des fonds, cadre de classement, inventaires statiques ou dynamiques avec ou sans lien aux fonds numérisés ainsi que diverses options de recherche. Cette rubrique centrale remplit une double fonction : d’information d’une part, en fournissant des informations aussi exhaustives que possible pour permettre au chercheur de juger de l’utilité d’une visite ; de promotion d’autre part, en mettant en valeur et en attirant son attention sur certains thèmes ou documents particulièrement intéressants.

Les sources complémentaires permettent de diriger le chercheur vers d’autres sites ou sources d’informations utiles : bibliothèques, services d’archives, portails thématiques, associations, etc.

L’ensemble de ces rubriques permet de remplir les différentes fonctions que l’on attend d’un site web d’archives. Chacune participe à guider et à canaliser le chercheur dans sa recherche d’information. Cependant celui-ci demande avant tout d’avoir accès aux instruments de recherche (Salzmann, 2004 : p. 46).

Les instruments de recherche en ligne
Les choix stratégiques de diffusion des instruments de recherche dépendent directement de la technologie utilisée dans le service d’archives. En effet, le logiciel employé et les possibilités qu’il offre au niveau de la recherche et des formats de résultats influenceront largement le niveau d’information offert au public sur Internet. Tous les systèmes de gestion de bases de données offrent actuellement des options de recherche et de rendu de rapports de recherche paramétrables.

Ainsi la plupart des systèmes de gestion de bases de données utilisent le format SQL, qui est le standard le plus répandu pour la structuration de bases de données. Or, en informatique, des données standardisées peuvent être utilisées par différents logiciels, contrairement aux données propriétaires. Il est donc possible d'exploiter directement ces données bien adaptées au web soit en élaborant soi-même - ou avec l'aide d'un informaticien qualifié - un module de connexion à cette base de données au web, soit en utilisant un autre logiciel permettant de mettre en ligne une base de donnée de format SQL (2).

Une autre option est le recours au standard XML (4). Le format XML est adopté par de plus en plus de professionnels, comme une méthode de description de données digitales, internationale, non propriétaire et indépendante. Ce format facilite l'échange de données électroniques, la manipulation des données et la recherche Internet (Higgins, 2003 : p. 199). XML est d'autant plus approprié à la description des archives qu'il a été spécialement adapté à la norme ISAD(G) par l'élaboration de EAD, une définition de type de document (DTD) spécialement conçue pour la recherche Internet de données hiérarchisées d'archives (ibid. : p. 204). En outre, XML est le format utilisé dans la plupart des projets exposés dans la littérature professionnelle (Higgins, 2003 ; Burgy, 2004). Le transfert des systèmes de gestion dans un environnement XML est une possibilité pour mettre en ligne les inventaires d’archives. Actuellement, les principaux logiciels documentaires utilisés dans les services d’archives offrent des fonctions d’export automatique des données en XML. Par ailleurs, un tel transfert permet d'être en phase avec les pratiques archivistiques actuelles, de conformer tous les inventaires qui ne le sont pas encore à la norme ISAD(G), de se détacher de la dépendance envers les sociétés propriétaire et de s'inspirer des projets de mise en ligne d'inventaires menés par différentes institutions.

Il est aujourd’hui capital d’appliquer les différentes recommandations de la profession concernant les normes techniques et l’usage de formats libres pour permettre une collaboration optimale entre les institutions. Cette collaboration est nécessaire à une plus grande ouverture des archives car, par un effort commun de partage de compétences et de moyens, elle rend possible un accès public étendu aux informations conservées dans les services d’archives.

Perspectives et enjeux actuels
Comme le démontrent les exemples exposés précédemment, les technologies offertes par le web rendent possible de nouveaux concepts, tels que celui de salle des inventaires, voire de salle de lecture virtuelle. Cette tendance a été accentuée par l’avènement du web 2.0, ou web de seconde génération, qui permet une plus grande interaction entre les archivistes et leurs publics. Ici encore, les Archives municipales de Rennes ont été pionnières en proposant à leurs internautes volontaires (surtout des généalogistes) un procédé d’indexation collaborative des registres d’état civil rennais (Rennes, en ligne). Bien cadrée par des procédures de contrôle de la qualité de l’indexation proposée, cette opération a rencontré un vif succès et a fait naître d’autres projets du même type, notamment avec l’Université de Rennes. Autre réalisation intéressante faisant participer le public aux tâches archivistiques, le projet « Your Archives » des Archives nationales du Royaume Uni, où les usagers contribuent aux descriptions, transcriptions et rédaction des notices biographiques (England, Wales and United Kingdom, en ligne). Les mécanismes de « navigation sociale » offerts par le web 2.0 permettent en outre aux internautes de commenter, de filtrer les requêtes en fonction des intérêts (filtre collaboratif), de marquer les pages ou encore de voir qui est en ligne (Yakel, Shaw, Reynolds, 2007).

En outre, l’élan d’ouverture des archives tend a se fédérer et à se structurer. Ainsi, Archives Canada propose son Réseau canadien d’information archivistique, métamoteur permettant d’effectuer une seule recherche dans l’ensemble des bases de données des services participants (Archives Canada, en ligne). Dans le même ordre d’idée, « Bora Archives privées » fédère les bases de données des archives privées françaises (Direction des Archives de France, en ligne). « Les passerelles sont également nombreuses entre patrimoine et archives dans le domaine de la recherche et de la mise en valeur documentaire » (Rambaud, 2005 : p. 96). En effet, les efforts de diffusion mis en œuvre par les Archives tendent de plus à rejoindre ceux des autres institutions patrimoniales telles que les bibliothèques et les musées. Les attentes des utilisateurs et la mise en place de standards facilitant la mise en place d’outils de recherche transversaux conduisent à un rapprochement entre institutions patrimoniales. Des portails en tels que « MICHAEL » [Multilingual inventory of cultural heritage in Europe] démontrent d’une volonté commune de partage et de transversalité entre insitutions patrimoniales et témoignent de la mise en œuvre d’une véritable « mémopolitique », ou politique patrimoniale coordonnée (MICHAEL, en ligne). Seule l’absence de standard commun et le relatif cloisonnement des pratiques professionnelles freinent ce rapprochement et créent une prolifération des outils de recherche qui nuit à leur utilisation.

Les enjeux actuels sont donc la normalisation des pratiques de descriptions archivistiques, l’adoption de standards favorisant l’interopérabilité entre institutions patrimoniales ainsi que l’homogénéisation des outils de recherche offerts. Ainsi le public, jusque là usager mais peu critique face à la prolifération d’outils de tout genre, pourra réellement bénéficier d’instruments cohérents et de données normalisées. L’impact des outils proposés sur le public est encore peu étudié, mais les services d’archives proposant de véritables salles de lecture virtuelles ont constaté une nette diminution des visites dans le service. Face à cette baisse de fréquentation et en l’absence de statistique d’utilisation des sites web et des outils de recherche qui y sont proposés, les services émettent certaines craintes légitimes. Comment, en effet, justifier les ressources allouées au service de référence en l’absence d’usagers ? Et, paradoxalement, comment faire revenir le public dans les archives après lui avoir donné les moyens de s’en distancer ?

Démarche de conception d’un site web d’archives

Afin de correspondre au mieux aux exigences archivistiques ainsi qu’aux besoins du public, la démarche de conception d’un site web d’archives peut être divisée en six grandes étapes, dont voici une brève présentation. La première étape est l’analyse de l’existant et des besoins. Elle permet de cibler les objectifs du service ainsi que les attentes de ses usagers en matière de diffusion. La seconde étape propose la mise en place d’une stratégie de diffusion, qui détermine la politique de diffusion du service ainsi que ses priorités en termes de diffusion. La troisième étape consiste en la modélisation du site sur la base d’un cahier des charges établi à partir des informations recueillies durant les étapes précédentes. Suit alors l’étape de la réalisation, qui nécessite des choix logistiques et techniques ainsi que la priorisation dans la création du contenu. Il est en effet inévitable, et c’est l’objet de cette avant-dernière étape), de procéder à des choix. Ceux-ci concernant notamment les modalités d’accès aux documents, qui posent des problèmes tant intellectuels que techniques : sous-traitance de la création du site, traitement des informations confidentielles, tarification des services, etc. La dernière étape permet d’inscrire le site dans la durée en assurant sa maintenance et sa promotion. L’ensemble de ces étapes est détaillé et enrichi dans un wiki relatant l’ensemble de la démarche et son contexte de recherche.

A propos du guide de diffusion des archives…
Toutes les réalisations existantes convergent vers une diffusion de plus en plus large des archives. Cependant tous les services n’ont pas encore entamé cette démarche, c’est pourquoi j’ai capitalisé dans un wiki les résultats de mes recherches sur la diffusion ainsi qu’un guide exposant la démarche de conception et de réalisation d’un site web d’archives. Cette plateforme se veut évolutive et je laisse le soin à qui le souhaite d’y intégrer ses considérations. Elle se trouve à l’adresse suivante : http://archiveswebsites.pbwiki.com.

Pour conclure…
La fonction « diffusion » bénéficie largement de l’esprit d’ouverture et de promotion qui s’est développé dans le domaine des archives. Intégrée à la stratégie des services, elle s’institutionnalise et se traduit par la mise en œuvre souvent combinée de différents moyens de diffusion. Dans cette fonction, les archivistes ont su tirer parti des avancées technologiques pour répondre aux besoins du public. Ils offrent ainsi aux chercheurs, très demandeurs de services à distance, un accès de plus en plus complet au monde des archives, allant de la présentation des services aux documents d’archives numérisés en ligne. Par des sites web offrant plusieurs niveaux d’information destinés aux différents publics, ils guident à distance les chercheurs vers les sources appropriées. La mise à disposition d’instruments de recherche est l’élément central à résoudre lors de la conception d’un site web d’archives. Différentes technologies et systèmes de description se côtoient, avec pour conséquence un manque d’homogénéité des sites existant. Cependant un effort de normalisation (notamment avec EAD) et une volonté de synergie entre institutions patrimoniales présupposent une harmonisation prochaine des pratiques. De plus, les apports d’outils de type « web 2.0 » aux sites web d’archives ont déjà été salués par les chercheurs, qui en apprécient les nouvelles possibilités d’interaction.

Notes

(1) BUGNON, Nicolas, ERARD, Reynald, FILIPPOZZI, Lorraine (2006). RAS on the web : élaboration d'une stratégie de diffusion et création du site web du Service Records et Archives de l'OMS. 136 p. Travail de diplôme, Haute Ecole de Gestion, Filière Information et documentation, Genève, [consulté le 05.12.2007]. http://doc.rero.ch/search.py?recid=6529&ln=fr

(2) HTML [Hypertext markup language] est un langage informatique de balisage conçu pour écrire des pages web [Wikipédia]

(3) SQL [Structured query language], ou langage structuré de requêtes, est un pseudo-langage informatique standard et normalisé destiné à interroger ou à manipuler une base de données relationnelle [Wikipédia]

(4) XML [Extensible markup language], ou langage de balisage extensible, est un langage de balisage générique destiné à faciliter l’échange automatisé de contenus entre systèmes d’information hétérogènes [Wikipédia]

(5) OFFICE FEDERAL DE LA CULTURE (SUISSE). « Mémopolitique » - la mémoire nationale. Berne, Office fédéral de la culture, 2006. 5 p. [consulté le 05.12.2007]. http://www.nb.admin.ch/bak/dokumentation/publikationen/index.html?lang=fr&download=M3wBPgDB/8ull6Du36WcnojN14in3qSbnpWVZmmXmE6p1rJgsYfhyt3NhqbdqIV+bay9bKbXrZ6lhuDZz8mMps2go6fo

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© Ressi, no 7, avril 2008, ISSN 1661-1802, tous droits réservés Retour en haut de la page

Date de création : 30.04.2008
Date de dernière mise à jour : 30.04.2008