Robinsoneries – journal des bords : Danaé Meynet
C’est comme un long dimanche.
Un très long dimanche.
Mais cette fois, un dimanche où on ne peut pas se permettre de se reposer uniquement et simplement.
Parfois on perd la notion du temps, la notion d’importance. Je me sens seule avec mon travail. Hormis les rendez-vous aveugles qui sont là pour me rappeler que je mène mon bachelor, que mon travail est peut-être digne de discussion.
Je perds constamment cette notion d’importance. D’importance du travail que j’essaye de mener. J’oublie qu’il fait partie d’un cursus, d’un diplôme. J’essaye de m’y rattacher tout en voulant m’en détacher. Essayer d’être simplement sincère. Faire face à la déception, puiser dans ce nouveau cadre pour penser différemment.
C’est le deuil.
Le deuil d’un projet. Un projet important, un projet qui tissait déjà sa finalité dans ma tête.
Le travail que j’avais envisagé appartient à un cadre. Le déplacer demanderait trop d’énergie, risquerait d’accroitre l’insatisfaction. L’espace me manque et le souffle se fait dur à trouver. Le plus dur c’est de se détacher de cette notion de production. Envie de faire, de matériel, d’objet à tout prix. Je cherche l’équilibre entre soucis de produire absolument, de recherche infime de fierté bachelorèsque et celui de prendre du recul pour se retrouver, comprendre pourquoi je le fais.
Mais j’ai compris que renoncer à un projet déjà tracé c’est aussi casser des barrières. Coincée physiquement, mais plus libre. Libre de tests, libre des codes que je m’étais fixés. Je tente, j’essaye. La couleur n’est plus figée, la forme n’est plus définie. Il ne me reste que du temps à combler, profiter d’essayer, de créer simplement, sans but de montrer, sans but de jugement, sans but de finalité.
Je me suis fixé un travail journalier. La routine me fait oublier que je ne sais pas trop où je vais. Une section, reliée chaque jour à celle de la veille. Une section motivée par l’énergie du jour, composée et nourrie de ce que je trouve, de la couleur qui me parle. Travaillé dans les draps, au rythme de séries, durant de longues heures.
Un patchwork de confinement
Un long serpentin dont on ne connait pas encore la fin.
Publication :
- Danaé Meynet .
Avec les étudiant-e-s
