Dans le cadre du Master IS, des séminaires sont organisés par les étudiants sur différentes thématiques des sciences de l’information. A cette occasion, le sujet du Knowledge Management a été abordé et pour imager le contenu, un parallèle avec le domaine de la cuisine a été fait. Pour résumer et vulgariser une partie du contenu de cette présentation, cette relation culinaire va être approfondie dans cet article. Et quoi de mieux que de s’appuyer sur une mythique recette de cuisine, telle que la recette du cake d’amour du film Peau d’âne de Jacques Demy (1970) ?
Cependant, avant d’aller plus loin, il est nécessaire de se poser la question : qu’est-ce que le Knowledge Management ? Ce terme anglophone peut être traduit en français par gestion des savoirs. L’apparition de cette notion remonte aux années 1990. Celle-ci a été particulièrement développée dans le livre d’Ikujiro Nonaka qui est devenu une véritable référence dans le domaine.
L’ingrédient de base : la pyramide DIKW
Dans la communication, il existe différentes étapes de traitement des données, et celles-ci s’appuient sur la pyramide DIKW. L’origine de concept se trouverait dans ces deux vers du poème Chorus de T. S. Eliot (1934, The Rock).
Toujours dans une perspective culinaire, il est possible de mettre en lien les niveaux de la pyramide avec les différents aspects de la préparation du cake d’amour.
Data/Donnée :
Brute (signes/symboles), sans contexte -> Dans le cas de la recette, il s’agirait des ingrédients bruts comme la farine, les œufs, etc.
Information/Information :
Mise en relation, doit être utile et répondre aux questions interrogatives (qui, quoi, où, etc) – > Dans la recette, le nombre d’œufs et le fait qu’ils doivent être frais (« du matin »).
Knowledge/Connaissance :
Connaissance, synthèse des informations, celles-ci ont été traitées, structurées ou organisées -> C’est les instructions de la recette en elle-même, dans le cas ici c’est non seulement le livre mais aussi la chanson qui donnent les instructions précises.
Wisdom/Sagesse :
Usage des connaissances pour le « bien », par la pratique et l’expérience -> Dans le cas de la recette du cake d’amour, il s’agirait de l’ajout de l’ingrédient secret par la Princesse, c’est-à-dire du présent, ici une bague, et du souhait d’amour qui ferait que cette recette est exceptionnelle et dépasse la simple recette du cake inscrite dans le livre de recette.
Etablir la recette : le modèle SECI
Cependant, pour pouvoir finaliser une telle recette, il y a tout un processus auparavant. Celui-ci prend la forme du modèle SECI. Développé par Ikujiro Nonaka and Mohammad Hossein Takeuchi en 1996, il est la continuité de la pyramide DIKW et concerne les relations entre les connaissances.
Le concept s’appuie sur le fait que les connaissances peuvent se séparer en deux catégories. Les connaissances tacites, qui représentent 80% de la masse, sont hautement personnelles et propre à chaque individu. Celles-ci sont difficiles à formaliser et communiquer puisque que profondément ancrées dans l’action et immatérielles. Dans l’exemple culinaire, il pourrait s’agir de techniques développées à force de faire la recette et pourrait prendre la forme de petits gestes améliorant la pratique (par exemple : il faut que le beurre soit à telle température pour que le cake soit meilleur).
Les connaissances explicites, environ 20% de l’ensemble, ont un statut formel et systématique et sont déposées sur un support matériel. Cela correspond aux étapes de la recette et, comme le livre de recette le montre, elles sont facilement et durablement communicables par écrit.
Le modèle SECI explique le passage entre les différents types de connaissances décrites ci-dessus. Celui-ci prend la forme d’un cycle, c’est-à-dire avec un fonctionnement en continu. Cela fait que le processus est dynamique avec sans cesse la création de nouvelles connaissances. Le modèle SECI est formé de ces éléments :
Socialisation – de tacite à tacite : Lorsqu’une étape secrète de la recette est transmise d’une personne à une autre de manière orale (ce souhait d’amour ajouté à la recette classique du cake).
Externalisation – de tacite à explicite : Lorsque la personne qui a reçu ce secret la met par écrit dans son livre de recette personnel.
Combinaison – d’explicite à explicite : Lorsque l’auteur reprend une recette déjà connue (du cake classique) et publiée un autre ouvrage et qu’il la republie dans le cadre de son ouvrage.
Internalisation – d’explicite à tacite : Lorsque qu’une nouvelle personne va découvrir pour la première fois la recette du cake d’amour et qu’elle va apprendre la recette et la réaliser dans sa cuisine.
Et si on faisait une autre recette ?
Les éléments présentés ci-dessus servent de base pour comprendre et identifier ce qu’est le Knowledge Management. Cependant, il faut ensuite pouvoir assembler et utiliser ces éléments comme on peut faire différentes recettes avec deux mêmes ingrédients. Dans l’usage d’intelligence artificielle, en particulier de Chatbot, la connaissance théorique de ces éléments sont essentiels afin de pouvoir rédiger des prompts complets et efficaces.
Ainsi, c’est comme assembler les ingrédients de différentes manières pour pouvoir proposer d’autres recettes. Finalement, pourquoi ne pas essayer la prochaine fois de cuisiner la fameuse recette de ratatouille du dessin animé du même nom ?
Bibliographie :
NONAKA, Ikujiro, 1991. The Knowledge-Creating Company. Harvard Business Review [en ligne]. 1 novembre 1991. Vol. 69, no 6, pp. 96-104. Disponible à l’adresse: https://openurl.ebsco.com/xth%3A9201061306/detailv2?sid=Primo&volume=69&atitle=the%20knowledge-creating%20company&date=19911101&spage=96&issn=0017-8012&issue=6&genre=article&title=Harvard%20business%20review.&epage=96&link_origin=none [consulté le 26 septembre 2024].
JARRAHI, Mohammad Hossein, ASKAY, David, ESHRAGHI, Ali et SMITH, Preston, 2023. Artificial intelligence and knowledge management: A partnership between human and AI. Business Horizons. 1 janvier 2023. Vol. 66, n° 1, pp. 87-99. DOI https://doi.org/10.1016/j.bushor.2022.03.002.
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