Le biais de genre dans la recherche médicale

Le biais de genre est un terme datant du 21^e siècle qui consiste à accorder une préférence aux individus selon leur genre (3). Il s’agit d’un biais cognitif de stéréotype faisant partie des mécanismes de discrimination. Ce biais peut être indirect et donc difficile à mettre en évidence. Le nombre inférieur de femmes dans les sciences peut être, par exemple, en partie expliqué par le stéréotype disant que « les ingénieurs sont des hommes ».

La problématique du biais de genre, et plus généralement de l’équité homme-femme, est large et touche l’entièreté le monde du travail, notamment en ce qui concerne l’égalité salariale : à formation équivalente, le travail des femmes sera tout autant qualitatif que celui des hommes, elles ne sont pourtant pas toujours payées un salaire égal.

Ce biais de genre se retrouve également à tous les niveaux de la recherche médicale, à commencer par les populations de recherche qui ne sont pas toujours représentatives. Les sujets de recherches ne sont pas toujours choisis réellement au hasard et les femmes sont globalement moins étudiées que les hommes, ou leurs symptômes sont moins pris au sérieux. Cela mène notamment à une moins bonne connaissance des spécificités féminines (parce que oui, des différences existent) et à de potentielles erreurs de diagnostiques. Les maladies cardiovasculaires, par exemple, ne touchent pas que les hommes. Elles ont cependant beaucoup moins été étudiées chez les femmes et sont donc moins diagnostiquées, notamment car les symptômes ne sont pas forcément les mêmes (4).

Même en laboratoire les sujets testés sont plus souvent mâles que femelles, et les résultats généralisés aux deux sexes (4). En résulte des effets secondaires de médicaments plus importants chez les femmes et une qualité inférieure de prise en charge par le personnel médical.

De la prévention est donc faite par les universités et les centres médicaux pour sensibiliser les étudiant·e·s et praticien·ne·s et limiter ces biais. L’UNIGE a ainsi créé en 2020 le Groupe médecine, genre et équité « afin d’intégrer la question du Genre dans une démarche égalitaire et équitable dans le curriculum médical » (5). Du côté de l’Unisanté (UNIL), les étudiant·e·s sont encouragé·e·s à réfléchir à la question du genre en médecine durant les premières années de leur cursus (6).

En 2023, le Conseil fédéral a lancé le programme de recherche national « Médecine, santé et genre » afin de mieux inclure les principes de genre dans la recherche et la prise en charge médicale (7). Les choses avancent donc, mais il y a encore beaucoup à faire.

Dès le plus jeune âge, les enfants sont influencés par des stéréotypes, associant certaines disciplines à un genre ou l’autre (8). Ces préjugés se retrouvent dans les choix de carrières des étudiant·e·s et dans leur carrière académique. Les femmes ont moins d’opportunités professionnelles dans les sciences et moins de chance d’obtenir des financements pour leurs recherches (9). Elles publient moins que les hommes et sont souvent créditées à des places moins prestigieuses dans l’ordre des auteur·ice·s des articles, la place de séniorité n’étant que dans 20% des cas occupée par une chercheuse (10). Le processus éditorial semble lui aussi biaisé : un homme soumettant un article a plus de chance d’être publié qu’une femme.

Ce biais se retrouve donc dans de nombreuses métriques, comme le nombre de citations d’articles écrits par des femmes ainsi que dans leur h-index, dans la reconnaissance de leur travail, et dans leur taux d’acceptation de publication (11).

Les femmes occupent globalement moins de postes en recherche et développement que les hommes, en particulier dans le privé (36% des places). Dans le secteur public les femmes sont cependant plus représentées (46%) (12). Il serait donc logique qu’en cas de financement public, par swissuniversities par exemple, le nombre d’articles écrits par les femmes soit sensiblement le même que les hommes.

La question du financement en lien avec un biais de genre, n’a que peu été étudiée jusqu’à aujourd’hui. Elle fera l’objet de notre prochain billet de blog. Affaire à suivre, donc.

(1) FMH, HOSTETTLER, Stefanie et KRAFT, Esther, 2025. Statistique médicale de la FMH 2024.

(2) FMH, HOSTETTLER, Stefanie et KRAFT, Esther, 2019. Peu de femmes aux postes de cadre. BULLETIN DES MÉDECINS SUISSES.

(3) WIKTIONNAIRE, 2025. Biais de genre. Wiktionnaire, le dictionnaire libre [en ligne]. Disponible à l’adresse : https://fr.wiktionary.org/w/index.php?title=biais_de_genre&oldid=38489344 [consulté le 17 août 2025]. Page Version ID: 38489344

(4) LAVIGNE, Elodie, 2020. La médecine à l’heure de l’égalité. Pulsations [en ligne]. Disponible à l’adresse : https://pulsations.hug.ch/article/medecine-egalite.html [consulté le 7 septembre 2025].

(5) UNIGE, 2025. Groupe médecine, genre & équité – Commission de l’égalité de la Faculté de médecine – UNIGE. Université de Genève [en ligne]. 14 mai 2025. Disponible à l’adresse : https://www.unige.ch/medecine/egalite/groupe-medecine-genre-equite [consulté le 7 septembre 2025]. Last Modified: 2025-05-14T13:30:13Z

(6) UNISANTÉ, 2019. Biais de genre dans la pratique médicale: approche réflexive avec les étudiant·es | Unisanté. Unisanté [en ligne]. ca 2019. Disponible à l’adresse : https://www.unisante.ch/fr/formation-recherche/recherche/projets-etudes/biais-genre-dans-pratique-medicale-approche-reflexive [consulté le 7 septembre 2025].

(7) OFSP, 2024. Bases scientifiques pour l’équité en santé [en ligne]. OFSP. Disponible à l’adresse : https://www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/87595.pdf [consulté le 3 septembre 2025].

(8) EUROPEAN UNION, s.d. Career choices. [en ligne]. s.d. Disponible à l’adresse : https://end-gender-stereotypes.campaign.europa.eu/career-choices_en [consulté le 22 août 2025].

(9) JAMES, Alex et al., 2024. Female-dominated disciplines have lower evaluated research quality and funding success rates, for men and women. RODGERS, Peter (éd.), eLife. Vol. 13, p. RP97613. DOI 10.7554/eLife.97613.

(10) VRANAS, Kelly C. et al., 2020. Gender Differences in Authorship of Critical Care Literature. American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine. Vol. 201, no 7, pp. 840‑847. DOI 10.1164/rccm.201910-1957OC.

(11) ROPER, Rachel L., 2019. Does Gender Bias Still Affect Women in Science? Microbiology and Molecular Biology Reviews : MMBR. Vol. 83, no 3, pp. e00018-19. DOI 10.1128/MMBR.00018-19.

(12) FEDERAL STATISTICAL OFFICE, 2025. Près de 26 milliards consacrés à la recherche et au développement en Suisse en 2023 – | Press release [en ligne]. OFS. Disponible à l’adresse : https://www.bfs.admin.ch/asset/en/33948581 [consulté le 26 août 2025].